Alors qu’Irisa explorait le studio bordélique de son nouveau maître, celui-ci restait sur son canapé, tranquille, souriant, la regardant aller et venir en se grattant négligemment les côtes… A ses yeux, elle ressemblait à une petite souris dans une nouvelle cage, elle l’explorait de fond en comble, allant dans la salle de bain, la chambre, revenant, tournant, virant… Il voyait dans le regard de sa petite chose qu’elle jaugeait les yeux, comptant les choses qui gisaient sur le sol en prévoyance du futur travail qu’elle allait avoir à accomplir. Au moins avait-elle contente de sa nouvelle résidence…

Quand elle protesta sur le fait qu’il l’ai appelé « petite », il se contenta de sourire et de venir se tenir droit en face d’elle, la dominant du sommet de sa haute taille, la tête baissée vers elle pour pouvoir ne serait-ce que la voir. Pas besoin de rajouter de mot, si, elle était petite, elle était même absolument minuscule à l’aulne du gabarit de son maître.

Il la laissa poser ses questions, tirant une chaise pour y poser son cul musclé et croiser les jambes sur son bureau, reprenant la posture qu’il avait avant de partir « faire ses courses », une posture un peu « par défaut » qu’il adoptait pour réfléchir ou simplement ne rien faire (ce qui lui arrivait souvent), écoutant ses demandes et doléances d’une oreille légèrement distraite.

« Je ne sais pas, prends des trucs dans le frigo et fais quelque chose avec ça, je m’en moque pas mal… Bien sûr que tu peux prendre un bain. (Il tourna la tête vers elle avec un petit sourire) Mais ne ferme pas la porte ~ »

Quand la question plus sérieuse de la raison de son adoption vint, il soupira, posant ses pieds à plat sur le sol, réfléchissant sérieusement à la réponse... Il n’en avait aucune idée, à vrai dire ! Se grattant la barbe, il observait sa servante… Elle était belle, aucun doute là-dessus, très agréable à l’œil, et ne semblait pas plus débile que la moyenne… Sans la lâcher des yeux, amusé par sa rougeur mais très concentré, il se leva et se recula pour l’avoir en entière dans son champ de vision, comme la jaugeant du regard.

« Ich… weiß nicht… Pourquoi toi et pas une autre ? Peut-être parce que j’ai besoin de mouvement dans mon existence ? Parce qu’une esclave « calme » m’aurait emmerdée ? Parce que je savais que je pourrais t’avoir avec un solide rabais ? Qu’en sais-je. Contente-toi de m’être reconnaissant de t’avoir tiré de ta fange. »

Il se rapprocha d’elle et posa sa main sur sa tête pour la caresser un peu, le visage absolument neutre, avant de tiquer, comme distrait par quelque chose, une sorte de moustique, et sa main vola pour venir intercepter cette queue stupide qui s’agitait devant ses yeux depuis tout à l’heure, en saisissant la pointe entre le pouce et l’index, la tirant légèrement pour pouvoir mieux la voir.

« Pourrais-tu, s’il te plaît, faire en sorte que cette chose arrête de gigoter en permanence ? C’est extrêmement distrayant »

Tenant la queue de l’hybride du bout des doigts, il la toisait, l’air passablement irrité.

Enfin, elle admit sa petitesse. Sa nouvelle acquisition semblait savoir faire preuve d’humilité, qualité qui ne se conjugue que bien trop rarement avec l’hyperactivité, et cela seyait au maître de céans. Avoir une petite chose bondissante en sa maison le pousserait à bouger un peu plus lui-même et animerait les journées de langueurs où il n’avait pas de travail (c'est-à-dire la majorité d’entre elles). En bref, elle allait pouvoir apporter un peu de mouvement dans sa vie somme tout quelque peu morne.

La réaction d’Irisa lorsqu’elle lui prit la queue le surprit fortement. Certes, il pensait bien que cet appendice supplémentaire devait être sensible, mais comme un doigt ou n’importe quel bout de peau, pas au sens sexuel du terme… Il la laissa se libérer, éclatant de rire en la voyant prendre la poudre d’escampette, rouge comme une pivoine après avoir fait son aveu. Oui, définitivement, elle allait pouvoir apporter un peu de vie dans celle de ce géant donneur de mort. Cela dit, sa révélation ne tombait pas dans l’oreille d’un sourd, et il se promit de pousser plus avant la résolution de ce mystère qu’était cette queue gigotante.

Et elle se mit au travail, d’emblée, sans chercher à prendre un sas de décompression entre ses deux cages. C’était sans doute pas très bon pour elle, mais Meister n’avait jamais été le genre plein de compassion, aussi se contenta-t-il de hausser les épaules et de retourner s’affaler sur son divan, bouquinant vaguement en écoutant l’agitation assainissante de l’hybride, souriant en lui-même.

Un quart d’heure. Un pauvre quart d’heure lui avait suffit à rattraper plus de trois mois de bordel dans sa chambre. En la voyant ressortir, légèrement surpris, il jeta un coup d’œil dans la salle qu’elle venait de quitter et émit un petit sifflement admiratif. Il ouvrit les placards, les tiroirs et, constatant que tout était étonnement impeccable, il s’assit sur son lit, fait, abasourdi. Une telle entreprise lui aurait pris, à lui, sans doute une journée entière, tant il aurait rechigné, renâclé et flemmardé. Chacun son travail, supposa-t-il. Lui tuait des gens, elle faisait le ménage. Logique, en un sens.

Il se redressa quand elle l’entendit s’affairer en cuisine. Mon Dieu, mais n’arrêtait-elle donc jamais ? Rien qu’à la voir s’agiter et bosser dans tous les sens, il finissait par être fatigué. Elle parvint même à faire un repas acceptable avec les quelques bouts de restes qui trainaient dans son frigo. Sans elle, il aurait ouvert son frigidaire en se grattant les couilles, soupiré et commandé une pizza.

Il tourna la tête vers elle, tiré de ses pensées par son histoire de bain. Il lui un signe muet de la main pour lui signifier d’y aller. Elle méritait bien cette petite récompense pour son zèle, d’autant qu’elle ne devait pas avoir pris beaucoup de bain dans une vraie baignoire au cours de sa vie de misère. Et bien entendu, elle laissa la porte ouverte. Brave fille. Il l’y suivit, à pas de loup, sans faire le moindre bruit malgré sa démesurée grandeur, l’observant se désaper avec un plaisir voyeur.

Il n’avait pas pris le temps d’observer son corps quand elle était en soutif et culotte, à l’animalerie, trouvant cette façon d’exposer les produits excessivement vulgaire, mais dans le cadre de SA maison, SA salle de bain et étant donné qu’il s’agissait à présent de SON esclave, il n’éprouvait aucune gêne à la dévorer des yeux, charmé de ses formes, mais intrigué par les marques dans son dos… Des cicatrices ? Tiens, de quel animal était-elle hybride, au juste ? C’était d’habitude assez aisé à définir, mais là, il faut avouer que Meister séchait…

Et alors que lui séchait, elle plongeait dans l’eau, rétablissant une moyenne correcte. Le teuton tira un tabouret et vint s’asseoir à côté de la baignoire, observant son esclave en souriant, sa main venant passer dans ses cheveux roses (drôle de couleur, au passage…). Il garda le silence un moment, la laissant s’habituer à sa présence (elle ne devait pas avoir l’habitude d’avoir un mâle de sa carrure près d’elle dans sa nudité) avant de prendre la parole.

« - C’est quoi ces plaies dans ton dos ? »

La question était certes un peu abrupte, mais Meister n’avait pas l’impression de devoir prendre des gants avec elle. D’autant qu’il avait tout de même le droit d’en savoir plus sur une fille qui allait, malgré tout, partager sa vie à partir de maintenant. Même s’il l’avait copieusement rabaissée lors de sa négociation avec le marchand, il ne la considérait pas vraiment comme un « aspirateur automatique ». C’était juste une stratégie de négociation de base, dans le but de faire baisser les prix… Cependant, il se demandait si elle avait compris…

Triste histoire, il faut avouer… Meister ne s’attendait pas à entendre le résumé d’un épisode des bisounours en écoutant l’histoire de ses cicatrices, pas il ne pensait pas à quelque chose d’aussi… Glauque ! Il n’était pas spécialement un tendre, mais de là à faire une ablation de ses attributs à un hybride avant de le re-balancer dans la ménagerie… Il fallait être un tout autre type de taré que lui, qui ne prenait QUE du plaisir dans son boulot, qui était tout de même d’exécuter des basses œuvres et de flinguer des gens. Certains humains étaient quand même salaud… Au final, les zigouiller n’était peut-être pas aussi criminel que ça.

Puis elle se leva, s’exposant en plein et sans pudeur au regard d’homme de son maître, qui ne manqua pas de la mater au passage, le corps pulpeux de la belle donnant le signal de l’éveil à son petit soldat, très intéressé par ce qu’il avait sous le nez… Et elle se cassa la gueule, s’affalant sur lui de tout de son long, arrachant au teuton un juron issu de son Allemagne natale.

Là, les pensées se bousculèrent dans sa haute tête. Déjà, le cuir mouillé, ça pue. Et elle venait de lui tremper son haut qui était, justement, en cuir, et l’idée de sentir le cuir mouillé ne le réjouissait même pas à moitié. Deuxième chose, si elle se cassait la gueule comme ça à chaque fois qu’elle prenait un bain, ça risquait d’être un problème. S’il n’avait pas été là pour amortir sa chute, elle aurait dit bonjour de façon assez virile au carrelage. Troisième, et dernière chose, qui le retint de la traiter de gourde : elle avait la poitrine extrêmement moelleuse.

Ce constat fait, il se racla la gorge et se releva de la chaise pour la poser les pieds par terre, stoïque, retirant son haut de cuir pour l’accrocher, le mettant à sécher sur un cintre en soupirant, torse nu et glorieusement musculeux, avant d’aller prendre une serviette dans un petit meuble blanc. Ladite serviette étant faite pour des gens de sa taille, il aurait pu cacher entièrement Irisa derrière. Ceci dit, il se contenta de la lui balancer entre les bras comme un paquet de sottise avant de s’adosser à un mur pour la regarder se sécher.

« - T’inquiètes pas, avec moi tu ne risques pas ce genre de trucs. Je ne suis pas exactement un sain, mais c’est pas le genre de choses que je pourrais faire, même dans un accès de rage. Allez, sèche-toi, je commence à daller. »

Ce disant, il ramassa les vêtements d’Irisa, les attrapant et les balançant en boule dans une poubelle avant de faire volte-face vers elle avant qu’elle n’ai eu le temps d’émettre ne serait-ce qu’un couinement de protestation, l’index impérieux pointant vers les fripes comme une langue de gargouille du haut d’une cathédrale.

« - Je ne veux pas que tu portes des vêtements datant de cette période de ta vie. J’irai t’en acheter un autre jour, en attendant tu porteras ce que tu pourras trouver à ta taille. Ou alors, ajoute-t-il avec un petit sourire en coin, tu ne porteras rien, c’est toi qui voit. »

Cela dit, et encore une fois sans laisser à son « interlocutrice » le temps de répondre, il partit s’asseoir, les pieds sur la table à côté de l’assiette, allant à l’encontre de toutes les lois de bonne tenue jamais considérées par l’homme. Il aurait pu prendre le temps de se rhabiller, mais non. Il avait bien le droit de se promener torse poil dans sa maison si bon lui chantait, après tout.

Bien. Pas de discussion, pas d’opposition, pas la moindre velléité de protestation chez Irisa quand ses vêtements furent jetés. Après, Meister n’avait aucune idée de quand exactement cet évènement avait pu se passer, mais même si cela était arrivé avant que ne fasse l’acquisition de ces frusques, elle les avait tout de même quand elle n’était qu’un bout de viande à vendre sur des étals, et ce n’était pas ce qu’il désirait avoir dans sa maison. Certes, elle n’était pas un être humain, mais elle ne méritait quand même pas d’être dégradée aussi bas…

Or donc, Irisa revint de la chambre, portant un plus tellement trop grand pour elle que la première réaction du maître de maison fut d’échapper un petit rire moqueur à travers bouche fermée. Puis il l’observa un peu plus, notant quelques détails, comme le fait que la coupe assez étroite du pull (comme de tous ses vêtements d’ailleurs) le faisait tomber de façon à parfaitement souligner la forme de sa poitrine et que l’addition d’une queue à sa morphologie faisait remonter le pull par l’arrière. Au final, cela le fit doucement sourire et l’observer encore plus attentivement…

Sur le chemin, comme elle devait passer à portée de main, il se permit de céder à une petite envie et fit claquer le plat de sa grande main sur son derrière rebondit avec un petit « hmm » appréciatif, trouvant ce petit (tout étant relatif) derrière très à son goût, sans pour autant ajouter un mot, se contentant de la regarder en gardant son petit sourire. Sur ce, il la laissa dresser la table en la matant amplement au passage, servir ses assiettes, besognes qu’on ne fait pas soi-même, en revanche il se leva pour prendre une Despé dans le fridge quand elle ramena de la flotte avant de lui lancer un petit regard sans expression. Yup, il voulait juste qu’elle s’en veule de ne pas avoir deviné. Mesquin ? Certes. Amusant ? Carrément.

Sur ce, il se mit à picorer, la bouteille de bière « saveur tequila » posée au pied de la chaise, l’assiette ayant quitté la table pour trouver asile en sa main à hauteur de son abdomen, ce qui était quand même plus pratique pour réaliser cet exercice compliqué qu’est de manger en gardant les pieds sur la table. Après tout, il n’en était pas à une violation des règles de bienséance près. Le contenu de ladite assiette était assez impressionnant. Avec quelques restes ramassés au fond d’un frigo qui n’avait pas connu de réapprovisionnement depuis environ une semaine, cette petite dame avait réussi à faire quelque chose de comestible et de raisonnablement goûteux, exercice dans lequel il se serait notablement foiré.

Et le silence revint. Le silence auquel il était habitué, n’ayant jamais considéré l’achat d’un poste de radio pour meubler sa vie. Il n’avait pas d’amis, pas d’amours, quelques plans-culs à travers la ville, son métier ne lui permettait pas de nouer de liens avec de potentiels collègues… Au final, Meister menait une vie assez isolée. Il ne s’en était jamais plaint, mais voir cette petite chose bondissante sous son toit allait changer bien des choses… Même le silence était plus agréable. Il était même TRÈS agréable.

Mais évidemment, il fini par se retrouver brisé, le silence. Par elle. Qui se sentit obligée d’ouvrir sa grande bouche (aux lèvres fortement pulpeuses) pour le pousser à parler de son travail. Voilà quelque chose dont il n’avait absolument aucune envie de causer. Pas qu’il n’aime pas son job, au contraire, il se tapait de bonnes barres, mais il n’aimait pas tellement en parler. Sauf en boîte. Quand une nana l’aborde, c’est son pêché de mignon de sortir : « je bute des gens pour gagner ma vie ». Réactions garanties, d’un côté ou de l’autre. Autant appliquer la même stratégie.

« - Je tue des gens. Annonça-t-il simplement entre deux bouchées, comme si de rien n’était, avant qu’elle ne parle de dessert. Un dessert ? Mouais, pourquoi pas… »

Il posa son assiette et s’étira avant de s’accouder à la table et reposer ses pieds par terre pour regarder la réaction de la petite en tétant sa bouteille de bière. Allait-elle paniquer ? Tomber sous le charme dangereux du faucheur de vie ? S’élancer vers la porte en criant « au meurtre » ? C’était le genre de trucs auxquels il s’était habitué à cette annonce. Ou alors elle allait juste ne pas réagir et aller faire son dessert, quoiqu’elle puisse faire avec le peu de matières premières dont elle disposait ici…